Le secteur technologique occupe une place de plus en plus importante sur les marchés financiers. Il montre une grande résistance dans la crise actuelle. Quelles en sont les raisons ? L’analyse de Karen Kharmandarian, Senior Portfolio Manager chez Thematics Asset Management et spécialiste de ces valeurs technologiques.
Pour commencer, quels types d’entreprises regroupe-t-on sous le terme « secteur technologique » ?
Les contours du secteur technologique et les types d’entreprises que l’on y regroupe ne sont pas précisément définis mais évolutifs, accompagnant la diffusion des innovations technologiques à l’origine de la mutation de nos sociétés.
La transformation numérique, le développement de l’intelligence artificielle, la mise en place de centres de données pour le cloud, sont quelques-unes des technologies permettant l’essor de nouveaux produits et services. Si nous trouvons des pépites technologiques dans de nombreux secteurs, elles restent pour la plupart regroupées dans ceux des Technologies de l’Information (avec des segments allant des processeurs aux éditeurs de logiciels) et les Services de Communication où l’on retrouve les entreprises emblématiques des réseaux sociaux et des moteurs de recherche.
Comment se sont comportées les valeurs boursières du secteur technologique depuis le début de l’épidémie du Covid-19 ?
Les valeurs technologiques ont démenti l’idée largement répandue d’être les plus touchées dans des phases de correction sévère des marchés. Aux Etats-Unis, du 20 février jusqu’au 15 mai, le NASDAQ, représentatif de ces valeurs, a perdu 7,9 % quand l’indice S&P 500, beaucoup plus diversifié, a perdu 15,0 %. Le NASDAQ réussit même le tour de force d’être en progression depuis le début de l’année, quand le CAC 40 est en retrait de 28,5 % !
Ces valeurs technologiques ont démontré un caractère défensif qui en a surpris beaucoup, à la faveur de caractéristiques recherchées par les investisseurs : des profils financiers solides, peu de besoin de faire appel au marché pour se financer, et une visibilité sur la croissance à long-terme qui permet de mieux estimer le prix payé par rapport à la valeur des entreprises dans lesquelles on investit.
L’annonce de Donald Trump de la suspension de l’immigration aux Etats-Unis inquiète la Silicon Valley qui y a fortement recours. Doit-on craindre des conséquences sur le secteur ?
Il est vrai que la Silicon Valley est un bassin d’emploi très important pour les ingénieurs et spécialistes étrangers, venant notamment d’Inde, de Chine ou d’Europe. Toutefois, la suspension de l’immigration décidée par D. Trump est temporaire, motivée par les circonstances sanitaires exceptionnelles et son impact devrait être transitoire.
Mais cet épisode met en exergue la tension qui existe depuis quelques années sur le marché du travail dans ce secteur pour attirer les talents du monde entier. Le secteur technologique offre des opportunités de carrière attractives et démontre que, dans les cycles de création destructrice qu’il favorise, il est aussi créateur de nouveaux métiers et d’emplois.
Peut-on considérer l’épidémie comme une opportunité pour le secteur et/ou pour les épargnants ?
La révolution technologique, qui s‘accélère, s’appuie sur des forces de croissance à long terme qui transforment le monde dans lequel nous vivons.
Le rôle prééminent des entreprises technologiques a de loin précédé la crise sanitaire, qui ne l’a non seulement pas remis en cause, mais qui n’a fait qu’accélérer la prise de conscience qu’elles font partie de la ‘solution’ aux défis collectifs auxquels nous devons faire face : téléconsultation médicale, automatisation des laboratoires de test, intelligence artificielle pour accélérer le développement de de traitements, automatisation des chaînes d’approvisionnement, sécurisation des paiements électroniques qui se généralisent, développement des divertissements en ligne sont quelques exemples qui viennent à l’esprit.
Cette crise est une opportunité de prise de conscience par les épargnants que ces valeurs technologiques vont non seulement traverser la crise, mais qu’elles vont en sortir pour beaucoup renforcées.
Propos rédigés le 15/05/2020 par Karen Kharmandarian, Senior Portfolio Manager chez Thematics Asset Management. Les analyses et les opinions mentionnées ci-dessus représentent le point de vue de l’auteur. Cet article ne constitue pas un conseil en investissement ni une recommandation ou une offre d’achat ou de vente de titres.