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Comprendre l’économie et les marchés financiers pour mieux gérer votre épargne.
19.04.23

L’OPEP et la politique de l’or noir

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Dans le spectre des organisations internationales, l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) occupe une place singulière. Construite comme une coopération d’États visant à optimiser les recettes issues de l’exportation pétrolière, l’OPEP s’est graduellement transformée en véritable moyen d’impacter les marchés mondiaux.

La formation de l’OPEP

Au début des années 1960, la nationalisation des industries pétrolières iraniennes débutée en 1951, par le Chah Reza Pahlavi, trouve un écho international dans la capitale irakienne. Conscients “qu’ils ne peuvent plus rester indifférents au comportement des industries pétrolières” (Accord portant création de l’OPEP, 14/09/1960), et de l’importance de ces revenus dans leur budget annuel, l’Arabie Saoudite, la Libye, l’Iran et le Venezuela s’associent pour former l’OPEP, afin de créer un système stable et rentable.

Émancipée en partie de la tutelle des puissances occidentales et turque, l’OPEP est d’abord conçue comme une entente cordiale pour contraindre les exploitants pétroliers à partager leurs bénéfices avec les États. S’appuyant sur le principe onusien de la libre utilisation des ressources naturelles, les concertations au sein de l’OPEP avaient pour objectif premier d’enrayer la baisse des prix dûe à la concurrence entre les compagnies pétrolières, puis d’augmenter les recettes en modifiant les législations relatives aux prélèvements, redevances et privilèges fiscaux.

À maints égards, cette première étape dans l’histoire de l’OPEP s’avère être une réussite. En effet, dès 1964, la Syrie est le premier pays à achever son processus de nationalisation. Partageant des activités avec l’Irak Petroleum Company (IPC), cette dernière obtient en 1967 une augmentation de 50% de ses redevances. Une première percée qui inspirera les pays de la région à en faire autant : l’Irak (1961-1972), la Libye (1969), l’Algérie (1971), l’Arabie Saoudite (1972-1980), l’Iran (1951-1979).

Pour autant, la création de l’OPEP et les nationalisations qui s’ensuivirent ne déstabilisa pas le cours mondial du baril de pétrole, qui oscilla à un niveau stable (entre 1,21 $ et 1,82 $ l’unité) sur la période 1960-1972.

Le tournant 1973

Dans un monde pétro-dépendant, l’OPEP gagne très vite en potentiel d’impact sur le marché pétrolier. En effet, les années 60 ont vu la demande de pétrole augmenter de 7% par an : l’économie mondiale devient particulièrement dépendante du pétrole, aussi bien pour le transport de marchandises que pour sa consommation en tant que bien intermédiaire.

En 1973, la guerre du Kippour entre Israël et ses voisins fait entrer l’OPEP dans une nouvelle ère. En quelques mois seulement, les pays exportateurs de pétrole décident unilatéralement d’augmenter le prix du baril de pétrole de 70%, ainsi que de diminuer sa production de 5% chaque mois jusqu’à l’arrêt du soutien occidental envers l’Etat hébreu. Le cours du pétrole quadruple : le baril passe de 2,60 dollars en octobre 1973 à 11,65 dollars en janvier 1974.

Cette action sur l’offre déstabilise les économies occidentales, qui observent une contraction de leur croissance économique. Et pour cause, le déficit du PIB s’aggrave, passant de 1,5% du PIB en 1974, à 4,6% en 1975. La “stagflation”, c’est-à-dire l’augmentation du chômage par le manque de croissance et la hausse de l’inflation, marqua en France, la fin des trente glorieuses : en deux ans (1973-1975), le taux de chômage bondit de 2%.

Pour autant, les résultats de l’action de l’OPEP sur le marché pétrolier sont à replacer dans un contexte économique bien plus global. La déstabilisation du marché de l’or noir s’inscrit également dans une logique d’instabilité monétaire, dûe à l’abandon en 1971 des accords de Bretton-Woods, qui garantissaient la convertibilité entre le dollar et l’or. Cette dépendance se fera pourtant encore sentir lors du choc pétrolier de 1979 initié par la révolution iranienne.

Les mutations du marché de l’énergie à l’aune des chocs pétroliers

Les différents chocs pétroliers ont vu les revenus de l’OPEP croître de manière exponentielle. Le second choc pétrolier, marqué par le renversement du Chah d’Iran et la guerre entre l’Irak et l’Iran, vit les recettes de l’OPEP multipliées par 36. Toutefois, si les conséquences à court terme restent désastreuses pour les pays importateurs, force est de constater que le tableau est beaucoup plus nuancé qu’il n’y paraît.

Si dans un premier temps, le double choc sur l’offre et la demande constitue une véritable manne financière pour les pays exportateurs, il suppose dans un second temps le recyclage de ces pétrodollars dans des domaines plus traditionnels : importations, investissements dans les pays développés, investissements dans les marchés locaux… Pour autant, seulement 50% des recettes sont réinvesties : un témoignage fort de l’insuffisance des dépenses publiques dans certains domaines. Un autre effet de cette hausse prend la forme de l’investissement vers d’autres structures extractives, comme le off-shore, considéré comme bien moins rentable.

Mais tout n’est pas profitable aux exportateurs. Les pays importateurs ont dès 1973 compris que la diversification de leurs sources d’énergies serait leur salut face au pouvoir d’impact de l’OPEP. C’est le choix qu’ont fait la France et le Japon, en se concentrant sur le secteur nucléaire dès la fin des années 1980, tandis que les États-Unis devenaient le premier producteur mondial de pétrole. Également, ce levier d’impact qu’est l’OPEP, contribue sur le long terme à modifier les structures productives : les entreprises ont été encouragées à trouver des modes de production consommant moins d’énergies fossiles.

L’avenir de l’OPEP dépend logiquement de l’avenir du pétrole. Ainsi, la montée en force des énergies renouvelables atténue petit à petit son impact sur le cours des marchés mondiaux.

Sources :