ReCOVery – Chapitre 1 : Renforcer la résilience des entreprises
La crise a renforcé la prise de conscience de la fragilité de nos économies interconnectées et souvent très spécialisées, notamment sur le secteur de la santé. De nombreux décideurs, publics ou privés, affichent une volonté de mieux identifier leurs risques, de repenser leur modèle économique, en termes d'achats mais aussi de positionnement, voire de rapprocher les centres de production et de consommation. En se basant sur les actifs incorporels essentiels de l'entreprise, les talents, clients, écosystème, impact RSE, infrastructures physiques et technologiques, en les reconsidérant à la lumière d'un Nouveau Raisonnable, les entreprises pourront accroître leur résilience, voire devenir anti-fragiles, et beaucoup plus adaptables face à des risques existants, mais aussi émergents.
Cartographier les risques
Cette crise invite surtout les entreprises à renforcer leurs investissements en matière de cartographie des risques afin de mettre en place les mesures préventives et permettant d’y faire face. Le XXIème siècle verra émerger de nombreuses menaces, dont certaines très différentes de celles rencontrées au cours de l’Histoire. Les entreprises doivent désormais se doter des outils de prospection pour y faire face. En particulier, le changement climatique et la chute de la biodiversité vont, selon toute vraisemblance, faire franchir à nos écosystèmes des points de rupture susceptibles de déstabiliser en profondeur nos économies. Les acteurs publics et privés doivent favoriser l’émergence, la robustesse et la diffusion de ces outils.
Diversifier les achats et les modèles
Face aux nouvelles typologies de risques, les entreprises doivent envisager de diversifier leurs fournisseurs afin de réduire leur dépendance à une source unique.
La crise pousse également à remettre en questions certains modèles économiques traditionnels. Les technologies sont passées à l’échelle pour permettre la distanciation sociale. Le paiement mobile évidemment, mais aussi des technologies autour de la santé comme la téléconsultation, ou encore tout simplement le travail à distance ou la montée en puissance du e-commerce. Des technologies hier exploratoires vont potentiellement devenir des barrières à l’entrée pour les entreprises qui ne les adoptent pas. L’intégration entre le offIine et online, qui était déjà pour beaucoup d’entreprises un sujet stratégique, va devenir encore plus critique.
Les acteurs du transport et de la logistique ont dû faire évoluer rapidement leur offre pour apporter une réponse satisfaisante dans l’urgence de la pandémie. Ils devront également se préparer aux menaces futures (distanciation physique, mise en place de tests…) mais aussi à faire face aux transformations environnementales.
Rapprocher production et consommation
Au-delà de la diversification, la résilience des entreprises passera également très certainement par une résurgence des circuits courts. En effet, des circuits dans lesquels lieux de production et lieux de consommation sont rapprochés limitent la vulnérabilité face aux chaînes d’approvisionnement internationales.
Ces « relocalisations » nécessitent de porter une attention particulière à la fois sur les secteurs concernés et leur échelle. Tous les secteurs doivent-ils être concernés ? Seulement certains secteurs ? En fonction de la valeur ajoutée du territoire ? De question de sécurité nationale ? Certains secteurs comme la santé ou l’alimentation, voire l’énergie ou les télécommunications, seront plus susceptibles d’être relocalisés. A l’inverse, la production de biens courants comme le textile ou les ordinateurs sont moins susceptibles d’être massivement relocalisés. Au-delà du type d’activité, le rapprochement des lieux de production aux lieux de consommation nécessite également de s’interroger sur l’échelle pertinente du circuit « court » (local, national, continental).
Dans tous les cas, ces relocalisations sont susceptibles d’augmenter les coûts de production et donc de mettre en péril la compétitivité des acteurs concernés. II est nécessaire de s’assurer d’un soutien des pouvoirs publics et des consommateurs afin d’assurer la pérennité de ces approches.
Nous insistons sur le fait que la valeur humaine est clé : il faut donner les moyens à tous de garder les talents en Europe et non d’aller acheter des compétences offshores à moindre coût. II s’agit également d’accompagner le changement à travers le développement et la montée en compétences des populations étudiantes et salariées, notamment sur les nouvelles technologies.
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Pendant 31 jours, l’initiative ReCOVery a mené une réflexion sur les enseignements à tirer de la crise pour reconstruire le monde de demain. Au cours de ces semaines d’échanges, six débats ouverts au grand public ont été organisés entre des représentants du monde économique, associatif et institutionnel. Une plateforme d’échanges en ligne[1] a également permis Ia remontée de plusieurs centaines de propositions, générant des milliers de réactions et commentaires. A travers ces différents débats et les contributions sur la plateforme en ligne, trois grands axes de réflexion se dégagent : la résilience, la durabilité et capitaliser sur les changements positifs.
[1] Accessibles sur recovery.wiki et https://recovery.braineet.com/