Les 3 actualités macroéconomiques de la semaine
Zone euro : l’inflation grimpe à 5,8 % en février
Au mois de décembre, l’inflation atteignait un nouveau record : 5 %. Au mois de janvier, ce record est battu : 5,1 %. Ce record vient d’être une nouvelle fois battu au mois de février, puisque l’inflation a progressé de 0,7 point et se positionne à 5,8 % en rythme annuel. Les prix de l’énergie sont ceux qui tirent l’inflation vers le haut : les prix ont augmenté de 28,8 % en janvier et de 31,7 % en février, avec pour cause la guerre en Ukraine. Cependant en février, d’autres prix s’envolent, ce qui n’était pas forcément le cas les mois précédents. Le tabac progresse de 4,1 %, les biens industriels de 3,5 % et les services de 2,5 %. Tous les pays de la zone euro sont concernés : 13,9 % en Lituanie, 12,4 % en Estonie, 7,4 % en Espagne (un record), 5,7 % en Italie (un autre record), 3,6 % en France.
Les perspectives concernant l’inflation ne sont pas bonnes et le conflit ukrainien participe largement à cet état de fait. Les cours de référence du pétrole brut se sont envolés à des niveaux inédits depuis 10 ans, “à plus de 110 dollars le baril” selon Les Echos. Les pays de l’OPEP+ n’ont pas souhaité augmenter leur production, ce qui alimente la hausse des prix puisque l’offre ne répond plus à la demande. “Record aussi pour le cours européen de référence du gaz naturel, le TTF néerlandais, à 194,715 euros le mégawattheure (MWh)”. Du côté des prix alimentaires les hausses sont également notables : le blé et le maïs sont au plus haut sur le vieux continent. Pour rappel, l’Ukraine et la Russie sont parmi les plus gros producteurs mondiaux de ces ressources. Les prix des huiles de soja et de palme augmentent également. Enfin, “la tonne d’aluminium, dont la Russie est le troisième producteur mondial, a aussi culminé mercredi à 3.580 dollars, un sommet historique”.
Ces nombreux éléments rendent pessimistes les économistes, qui estimaient que l’inflation serait transitoire. Aujourd’hui, certains estiment que la hausse des prix pourrait demeurer aux alentours de 5 % tout au long de l’année 2022. Un vrai défi pour la BCE, dont l’un des objectifs principaux est le maintien d’une inflation proche de 2 % à moyen-terme.
Turquie : l’inflation explose et atteint 54,4 % en février
La problématique de l’inflation ne concerne pas que la zone euro ou les États-Unis. De très nombreux pays sont encore plus durement touchés : c’est le cas de la Turquie. Au mois de février, elle a atteint 54,4 % en glissement annuel, un record depuis 2002. La hausse des prix était déjà de 48,7 % en janvier. Cette inflation record est alimentée par la hausse du prix de détail (+ 55,32 %) selon la Chambre de commerce d’Istanbul. De plus, la Turquie est très dépendante des importations d’énergie et de céréales en provenance de Russie, dont les cours croissent très rapidement en raison de la guerre en Ukraine. La situation ne devrait pas s’améliorer dans les semaines à venir, car même en cas de fin du conflit, les capacités ukrainiennes de production ne reviendront pas au maximum de leurs possibilités avant un certain moment. Les céréales en provenance de Russie devraient donc rester à des prix bien supérieurs à ceux précédant la guerre.
Un autre élément critique alimente l’inflation : l’effondrement de la livre turque face au dollar et à l’euro. Selon Le Figaro, “la monnaie nationale a perdu près de 44 % de sa valeur face au billet vert en 2021 : elle s’échangeait jeudi 3 mars matin à 14,11 livres pour un dollar et à 15,7 livres pour un euro”, en baisse d’un demi-point. N’arrivant pas à juguler l’inflation, le directeur de la Banque centrale turque fut limogé par le président Recep Tayyip Erdogan fin janvier, ce qui a entraîné une hausse de la défiance des marchés à l’encontre de la Turquie. De plus, le pays est régulièrement accusé de volontairement sous-estimer la hausse des prix pour conserver la paix sociale. C’est probablement dans ce but que la TVA vient d’être abaissée de 8 à 1 % sur les produits alimentaires de base, afin de soulager les consommateurs turcs.
Les règles budgétaires européennes suspendues jusqu’en 2024 ?
Le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) a été adopté en 1997. Il fixe des règles budgétaires pour les États-membres de la zon euro afin d’éviter les déficits budgétaires excessifs. Selon le PSC, un État voit son déficit limité à 3 % du PIB et sa dette à 60 % du PIB. En cas de manquement à ces règles, la BCE peut décider d’une amende comprise entre 0,2 et 0,5 % du PIB du pays contrevenant. Cette règle a été suspendue en 2020 pour permettre aux États de répondre efficacement et sans limite aux conséquences économiques du Covid-19. Par exemple en France, c’est la doctrine du “Quoi qu’il en coûte”. En théorie, ces règles devaient être à nouveau appliquées lorsque la pandémie serait résorbée. La guerre en Ukraine vient de chambouler les plans des défenseurs d’une certaines orthodoxie budgétaire, autrefois incarnée par l’Allemagne et les Pays-Bas notamment. Le PSC pourrait être gelé jusqu’en 2024 !
L’exécutif européen a annoncé qu’aucune procédure pour déficit excessif ne serait enclenchée à l’encontre des pays qui dépassent les limites autorisées. “Nous n’appliquerons pas la règle qui exige la réduction de la dette d’un vingtième pour les pays dont le ratio d’endettement est supérieur à 60 % du PIB”, a ainsi déclaré Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne. Pour l’Allemagne, qui vient de décider d’augmenter ses dépenses militaires, c’est un soulagement.
Aux dépenses liées au Covid et à la Défense, s’ajoutent celles en faveur de la transition écologique. Des dépenses que certains gouvernements considèrent comme incompatibles avec le PSC. Une Commission est actuellement à Bruxelles pour préparer les futures règles. Quelques soient les résultats de ces discussions, il apparaît clair aux yeux de certains analystes qu’il sera difficile de ramener les pays de la zone euro vers l’orthodoxie budgétaire après avoir tant permis le laisser-faire.
Sources :
- https://www.lesechos.fr/monde/europe/linflation-bat-un-nouveau-record-dans-la-zone-euro-1390781
- https://www.lefigaro.fr/conjoncture/turquie-l-inflation-bondit-de-54-4-en-fevrier-sur-un-an-record-depuis-2002-20220303
- https://www.lesechos.fr/monde/europe/ukraine-bruxelles-pourrait-prolonger-la-suspension-des-regles-budgetaires-jusquen-2023-1390871
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